Séance 5 - Textes 3 et 4 - Rimbaud
Lun 1 Juin - 19:57
Textes 3 et 4 – Arthur Rimbaud
Arthur Rimbaud (1854-1891) est un poète ardennais né à Charleville, amoureux des langues, marginal, révolté, anti-bourgeois, aventurier et libertaire. Sa carrière poétique s'est achevée volontairement très tôt, l'année de ses 21 ans. Pourtant, c'est devenu une vraie référence du XIXème siècle.
Désirant rester libre et insouciant, il aimait parcourir les chemins et cultivait une vie de bohème (voyageur sans possession, libre). Il a eu une aventure amoureuse avec le poète Paul Verlaine qui a été très tumultueuse et il a beaucoup voyagé, jusqu'en Éthiopie où il a été négociant et trafiquant d'armes.
Désirant rester libre et insouciant, il aimait parcourir les chemins et cultivait une vie de bohème (voyageur sans possession, libre). Il a eu une aventure amoureuse avec le poète Paul Verlaine qui a été très tumultueuse et il a beaucoup voyagé, jusqu'en Éthiopie où il a été négociant et trafiquant d'armes.
Texte 3, Arthur Rimbaud, « Roman », Cahiers de Douais, 1870.
→ Lisez le poème de Rimbaud (disponible pages 120-121 du manuel) (Manuel en ligne ici : https://fr.calameo.com/read/0048229531912ec123836 )
Roman I On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. - Un beau soir, foin des bocks et de la limonade, Des cafés tapageurs aux lustres éclatants ! - On va sous les tilleuls verts de la promenade. Les tilleuls sentent bon dans les bons soirs de juin ! L'air est parfois si doux, qu'on ferme la paupière ; Le vent chargé de bruits - la ville n'est pas loin - A des parfums de vigne et des parfums de bière... II - Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon D'azur sombre, encadré d'une petite branche, Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond Avec de doux frissons, petite et toute blanche... Nuit de juin ! Dix-sept ans ! - On se laisse griser. La sève est du champagne et vous monte à la tête... On divague ; on se sent aux lèvres un baiser Qui palpite là, comme une petite bête... | III Le coeur fou robinsonne à travers les romans, - Lorsque, dans la clarté d'un pâle réverbère, Passe une demoiselle aux petits airs charmants, Sous l'ombre du faux col effrayant de son père... Et, comme elle vous trouve immensément naïf, Tout en faisant trotter ses petites bottines, Elle se tourne, alerte et d'un mouvement vif... - Sur vos lèvres alors meurent les cavatines... IV Vous êtes amoureux. Loué jusqu'au mois d'août. Vous êtes amoureux. - Vos sonnets La font rire. Tous vos amis s'en vont, vous êtes mauvais goût. - Puis l'adorée, un soir, a daigné vous écrire !... - Ce soir-là..., - vous rentrez aux cafés éclatants, Vous demandez des bocks ou de la limonade... - On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans Et qu'on a des tilleuls verts sur la promenade. |
Vocabulaire - bocks = chopes / verres - foin de = tans pis pour - tapageurs = bruyants, voyants, scandaleux - tilleuls = arbres - être grisé = étourdi, ivre, heureux | - on divague = on rêve, on dit n'importe quoi, on erre - faux col = col rigide attaché à la chemise - les cavatines = mélodies brèves et légères d'opéra - sonnets = poèmes en 4 strophes, 2 quatrains, 2 tercets, en alexandrins. |
→ Répondez aux questions suivantes en citant du texte si possible :
(= « Le trésor des mots » + « Lecture » q. 1 à 4 p.121 + questions supplémentaires 5 et 6)
Le trésor des mots
Le verbe « robinsonner » (v.17) est un néologisme (mot inventé). D'où tire-t-il son origine ? Que signifie-t-il dans ce poème ?
Lecture
1) Quelle histoire ce poème raconte-t-il ? Proposez un titre pour chaque partie.
2) Qui est désigne par les pronoms « on », « elle » et « vous » ? Quel lien est ainsi établi avec le lecteur ?
3) a) Quels sens sont en éveil dans les parties I et II ? Justifiez à l'aide du poème.
b) Quel sentiment ces sens annoncent-ils ?
4) Dans les parties III et IV :
a) A travers les yeux de qui la jeune fille est-elle vue ?
b) Comment expliquez-vous la graphie du pronom « La » (v.26) ?
c) Comment les sentiments du jeune homme pour la jeune fille sont-ils évoqués ? Expliquez.
5) Dans ce poème, trouvez une métaphore et une comparaison. Expliquez-les.
6) Observez la forme de ce poème et donnez le type de vers et le schéma de rime utilisés.
→ Observez le tableau ci-dessous et répondez aux questions qui l'accompagnent.
(tableau disponible p.121)
A. Renoir, La Promenade, 1870, huile sur toile, Los Angeles, États-Unis.
1) Présentez ce tableau. (artiste, type d'oeuvre, sujet, personnages, décor, couleurs...)
2) D'après-vous, ce tableau est-il bien choisi pour illustrer le poème de Rimbaud ? (argumentez un peu)
3) Quel(s) éléments peuvent faire sourire dans ce tableau ? Pourquoi ?
- Correction des questions sur le texte 3 (cliquez ici):
Correction des questions sur le texte 3 – Rimbaud, « Roman »
Le trésor des motsLe néologisme (mot inventé) « robinsonner » (v.17) tire son origine du nom du personnage Robinson Crusoé, du roman d'aventure de Daniel Defoe (repris par Michel Tournier dans deux romans : Robinson Crusoé et Vendredi ou la vie sauvage). Ce personnage a subi un naufrage et a dû survivre sur une île pendant des dizaines d'années.
Dans ce poème, « le cœur fou robinsonne à travers les romans » signifie que l'on aime comme un survivant, en s'accrochant au premier visage que l'on voit, en s'inventant des histoire. Ici, le cœur se promène comme un naufragé, désorienté, perdu, assoiffé.
Lecture
1) Ce poème raconte l'histoire d'un homme qui a dix-sept ans et qui, délaissant les cafés, va un soir se promener « sous les tilleuls » d'une promenade. Il aperçoit alors une jeune femme, en compagnie de son père, et en tombe amoureux. Par la suite, ils s'écrivent et il se remet à fréquenter les cafés.
Les différentes parties de ce poème ont évidemment plusieurs titres possibles. Voici ce que vous auriez pu écrire :
Partie I : La promenade sous les tilleuls. / Loin des cafés et du bruit, sous les tilleuls. / Promenade d'un solitaire.
Partie II : Rêve d'amour sous les étoiles. / Nuit de juin et divagations. / Le besoin d'aimer.
Partie III : La demoiselle aux petits airs charmants. / Rencontre sous les tilleuls./ La charmante apparition.
Partie IV : L'amour, renaissance du poète. / Être amoureux. / Le pouvoir de l'amour.
2) « On » désigne tout le monde : le poète, les lecteurs, les gens en général.
« Elle » désigne la belle demoiselle rencontrée par le poète.
« Vous » désigne le poète mais nous donne l'impression que le poète est nous-même.
Ces pronoms tissent des liens étroits entre nous et le poète, pour nous pousser à nous identifier à sa personne et à vivre avec lui cette histoire d'amour.
3) a) Dans les parties I et II, les cinq sens sont sollicités :
- la vue avec par exemple les cafés « aux lustres éclatants » (v.3), les « tilleuls verts » (v.4) et « on aperçoit » (v.9) lorsqu'il parle du ciel et de l'étoile.
- l'ouïe avec les «« cafés tapageurs » (v.3) et le « vent chargé de bruits » (v.7)
- l'odorat qui met en avant les odeurs de la nature avec « Les tilleuls sentent bon » (v.5) ou les odeurs des boissons comme le vin et la bière avec « des parfums de vigne et des parfums de bière » (v.8 ).
- le goût lorsqu'il évoque les boissons vers 2 avec « des bocks et de la limonade », vers 8 avec « vigne » et « bière » ou encore vers 14 avec « champagne ».- le toucher, même s'il est léger, lorsqu'il évoque « L'air » et « Le vent » (v.7 et 8 ) ou le « baiser » qui « palpite » (v.15-16).
b) Tous ces sens annoncent le sentiment d'amour. En effet, le poète semble particulièrement mélancolique et solitaire, mais aussi très réceptif à la beauté de tout ce qui l'entoure. Il apprécie avec poésie son environnement et est très attentif à ce qu'il ressent, entend, voit...
4) Dans les parties III et IV...
a) La jeune fille est vue à travers le regard du poète. Nous le sentons grâce à l'emploi de la 2ème personne du pluriel qui remplace ici la 1ère personne du singulier : « Elle vous trouve immensément naïf » (v.20). Ce « vous » remplace le poète.
b) Au vers 26, le pronom « La » possède une majuscule pour désigner la jeune fille en lui donnant de l'importance. C'est ainsi presque un nom propre qui insiste sur son choix : c'est celle qu'il a choisie, pas une autre. Il est possible également que le poète veuille insister sur le fait qu'elle soit la seule à rire de ses sonnets tandis que ses amis, et sans doute le père de la belle, ne voient pas leur relation d'un bon oeil.
c) Les sentiments du jeune homme pour la belle sont évoqués à l'aide de nombreux adjectifs qualificatifs comme :
- « cœur fou » (v.17), qui signifie que ses sentiments ne sont pas conduits par la raison.
- « airs charmants » (v.19), qui insiste sur la beauté de la belle.
- « faux col effrayant » (v.20), qui montre que le père de son aimée risque d'être un obstacle.
- « naïf » (v.21), qui fait passer le poète pour un jeune homme rendu un peu simplet par la situation et qui risque de se laisser porter par ses sentiments malgré leur imprudence.
- « ses petites bottines » (v.22), qui vient donner à la jeune femme une certaines coquetterie adorable.
- « alerte » et « mouvement vif » (v.23), qui viennent presque comparer la belle à un animal à la fois craintif et curieux.
- « amoureux » (v.25 et 26), qui est répété pour qualifier le poète et insister sur le sentiment d'amour qui le dévore déjà.
De plus, le poète nous indique qu'il chantait des « cavatines » (v.24), signe de joie et de légèreté, et il nomme la belle « l'adorée » (v.28 ), nom très fort qui sous-entend une forme d'admiration presque religieuse.
Il explique en outre que ses amis « s'en vont » et qu'on dit de lui qu'il est « de mauvais goût » (v.27), comme si cet amour n'était pas sain. Cela pose un problème social.
Enfin, il ne cesse de répéter depuis le début du poème « On n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans », ce qui vient appuyer l'idée que cet amour manquait de maturité et qu'il était peut-être excessif.
5) La métaphore se trouve aux vers 9-12 :
- Voilà qu'on aperçoit un tout petit chiffon
D'azur sombre, encadré d'une petite branche,
Piqué d'une mauvaise étoile, qui se fond
Avec de doux frissons, petite et toute blanche...
Le « tout petit chiffon / D'azur sombre » désigne le ciel nocturne. Il n'y a pas d'outil de comparaison (comme, tel...) donc c'est une métaphore qui fait du ciel un tissu léger entraperçu derrière quelques branches de tilleuls.
La comparaison se trouve aux vers 15 et 16 :
on se sent aux lèvres un baiser
Qui palpite là, comme une petite bête...
Le « baiser » est comparé à « une petite bête » « Qui palpite », ce qui nous laisse l'imaginer comme étant mignon et fébrile, prêt à embrasser n'importe qui, voletant d'une fleur à l'autre, cherchant son bonheur. L'outil de comparaison est « comme ».
6) Ce poème est écrit en alexandrins (vers de 12 syllabes) et les rimes sont croisées (ABAB) dans toutes les strophes. C'est très régulier.
Conclusion : Dans ce poème, Arthur Rimbaud semble rire un peu de sa naïveté en amour quand il avait dix-sept ans. Il y met en avant son besoin de flâner sur les promenades le soir et de rêver sous le ciel étoilé et les tilleuls, tout en nous racontant combien l'amour peut être soudain, délicieux mais aussi compliqué. Pour lui, l'amour est une aventure qui intervient dans nos vies au moment où on l'attend le moins ou quand on accepte de s'ouvrir à lui. Il nous montre que lorsque son esprit se sent libre et qu'il se trouve dans un contexte favorable, attentif aux beautés de son environnement, il est facile de se prêter volontiers au jeu de la séduction...- Correction du tableau de Renoir (cliquez ici):
Correction des questions sur le tableau de Renoir
]1) Ce tableau est une huile sur toile réalisée par A. Renoir en 1870. Nommé La Promenade, il représente un couple qui se fraye un chemin dans un espace vert, s'enfonçant dans ce qui semble être un bosquet. L'homme porte un pantalon et un foulard blanc, une jaquette noire et un chapeau de paille tandis que la femme porte une longue robe d'un blanc éclatant, nouée à la taille par un ruban bleu, ainsi qu'un petit chapeau fleuri. L'homme devance la dame et lui tient la main pour l'entraîner à sa suite. La belle semble malheureusement perturbée par sa robe qui se prend dans quelques ronces. On ne distingue pas bien le visage de l'homme puisqu'il est déjà sous l'ombre de la végétation alors que celui de la femme, visible de deux tiers, nous est révélé. Les couleurs dominantes sont le vert de la végétation, le blanc des vêtements et le noir de la jaquette et des ombres, ce qui donne au tableau une certaine harmonie et respire la tranquillité. Cette oeuvre nous délivre ainsi l'escapade amoureuse de deux individus qui cherchent à se soustraire aux regards des autres dans un décor naturel et charmant.
2) Ce tableau représente une promenade et met en avant la végétation et l'amour, ce qui correspond plutôt bien au poème de Rimbaud. Cependant, le poète évoque une promenade solitaire, non loin de la ville, et sa rencontre (visuelle) avec sa belle : il ne parle pas d'une promenade à deux.
3) Dans ce tableau, plusieurs éléments prêtent à sourire :
- le fait que la jeune femme semble être empêtrée dans les ronces, ce qui nous prouve que sa tenue n'est absolument pas adaptée à ce genre de promenade...
- le fait que le jeune homme semble bien pressé de rejoindre les buissons, sans doute pour embrasser sa belle, et qu'il prenne une position d'aventurier alors qu'il ne semble pas lui-même très préparé à cette promenade...
Texte 4, Arthur Rimbaud, « Sensations », Cahiers de Douais, 1870.
→ Lisez le poème de Rimbaud
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds,
Je laisserai le vent baigner ma tête nue !
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien ;
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien
Portrait de Rimbaud par Carjat.
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.
→ Répondez aux questions suivantes en citant du texte si possible :
1) Observez la forme de ce poème. Donnez le type de vers et le schéma de rimes qui y sont utilisés.
2) Relevez le champ lexical de la nature.
3) Pourquoi le nom « Nature » (v.8 ) a-t-il une majuscule ?
4) Relevez deux comparaisons et expliquez-les.
5) Qu'est-ce que Rimbaud aime d'après ce poème ?
→ Observez la sculpture de Michel Gillet ci-dessous et répondez aux questions suivantes :Hommage à Rimbaud, sculpture en bronze de l'artiste ardennais Michel Gillet,réalisée en 1991 pour le centenaire de la mort du poète.Sculpture actuellement au parc de la gare de Charleville-Mézières, dans les Ardennes.
1) Comment l'artiste a-t-il représenté Rimbaud ?
2) Comment voit-on que l'artiste apprécie le poète ?
3) A votre avis, que représentent les lignes et les points qui traversent la sculpture ?- Correction des questions sur le texte 4 et la sculpture (cliquez ici):
Correction des questions sur le texte 4 – Rimbaud, « Sensations »
1) Ce poème est composé de deux strophes de 4 vers (quatrains). Il est écrit en alexandrins (vers de 12 syllabes) et les rimes sont croisées (ABAB).
2) Le champ lexical de la nature est très présent dans ce petit poème. Nous y trouvons en effet la saison de « l'été » (v.1), les « blés » et « l'herbe » (v.2), le « vent » (v.4) et la « Nature » (v.8 ).
3) Le nom « Nature » (v.8 ) a une majuscule comme s'il s'agissait d'un être vivant. C'est une personnification de la nature. Cela lui donne une grande importance, comme si le poète pouvait dialoguer avec elle, comme si c'était une femme qu'il pouvait aimer.
4) La fin du poème comprend deux comparaisons :
- « Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien » → Le poète se compare à un bohémien, c'est-à-dire une personne sans demeure, qui erre de ville en ville, et qui vit de peu de choses. Il se voit comme un homme libre de voyager et de partir où bon lui semble.
- « Par la Nature, - heureux comme avec une femme » → Le poète compare le bonheur qu'il éprouve à arpenter la nature avec celui de se retrouver avec une femme. La personnification de la « Nature » prend ici tout son sens.
5) D'après ce poème, Rimbaud aime la liberté, la nature et les femmes. En effet, il se considère comme un « bohémien » qui va « tête nue », c'est-à-dire sans contrainte, et il se dit « heureux » en compagnie de la « Nature » « comme avec une femme », ce qui place la femme et la nature sur un pied d'égalité : elle sont toutes les deux très belles et agréables.
Correction des questions sur la sculpture de Michel Gillet
1) L'artiste a représenté Rimbaud d'un seul trait clair, gravé, qui figure la silhouette de son visage. Simple mais efficace.
2) On voit que l'artiste apprécie le poète car il a inséré ce visage dans un grand cœur en forme de spirale.
3) Les lignes et les points qui traversent la sculpture sont en forme de constellation et représentent les différents parcours de Rimbaud ainsi que les étapes de ses périples. C'est le trajet du poète mais aussi de l'aventurier. C'est le symbole de sa liberté.
→ Regardez ce reportage sur l'exposition de 2015 « Arthurmania » et écoutez bien ce que Michel Gillet nous dit de Rimbaud et de sa sculpture.
Vidéo en ligne ici :
https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/ardennes/charleville-mezieres/charleville-mezieres-exposition-arthurmania-100-ardennes-650095.html
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